jeudi 26 mars 2009

Ce préservatif en question

par Françoise Arnaud, Ecrivain
Le monde, 20.03.09

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On allait pouvoir se déchaîner contre la religion, les ânes allaient braire et les loups hurler. Cela n’a pas raté. Quel concert !??Et, pourtant, si le Pape avait raison ??? Si, non seulement il avait raison, mais encore, s’il avait raison de le dire ? Le Pape, contrairement à nos hommes de pointes de tous bords, n’est pas là pour nous plaire, mais pour nous éclairer. Comme un phare qui ne commande point, mais se contente de guider. Ses avis, comme les recommandations du Conseil de l’Europe, n’ont rien de contraignant. On les suit ou on les ignore. En cela réside la liberté. Bien sûr, il y l’excommunication. Au fait c’est quoi l’excommunication ? L’interdiction, pour celui qui en est frappé, de participer aux sacrements. Point. Quel en est la portée, quelles en sont les conséquences sociales ? Alors qu’autrefois, cette mesure pouvait et avait de saumâtres répercussions sociales, politiques ou financières, de nos jours elle reste sans portée, cantonnée dans le domaine privé.

Nul ne porte sur le font une croix d’infamie. Elle n’entraîne pas le moindre préjudice financier. Contrairement à ce qui se passe dans les partis politiques, où, là aussi, une forme d’excommunication, qui ne dit pas son nom, est en vigueur. Pour en devenir membre, pour y jouer un rôle, il faut signer une « charte », Aucun parti n’y échappe, pas même Écolo. Je le sais, j’en ai fait l’expérience. Ayant refusé, de chanter jamais, à l’unisson dans le cas où je ne partagerais pas l’avis imposé par le parti, il me fut rétorqué : Dans ce cas l’on vous exclura ». Ce à quoi, j’ai répondu : « Pas la peine, voici ma démission ». Ceci se passait à ma première, et dernière, participation, à une réunion du conseil local. Cette excommunication là engendre des préjudices et la perte d’avantages sociaux pour ceux qui en jouissaient ou espéraient en jouir. On n’en parle pas.??Revenons-en aux paroles du Pape. Qu’a-t-il dit de si monstrueux que toutes ces voix qui lavent plus blanc que blanc, se croient autorisées à le traîner dans la boue ???Qu’il « interdisait l’usage du préservatif ». C’est faux et profondément malhonnête. Tout d’abord, il n’en a pas la pouvoir, ni d’ailleurs la volonté. Il le déconseille. Un point, c’est tout. Et, alors que la plus stricte des honnêtetés eut été de reconnaître la vérité de ses propos, d’admettre que c’était là la seule vraie solution. Que l’usage du préservatif n’était qu’un emplâtre sur une jambe de bois, mais que malheureusement dans l’état actuel de la société, elle restait pour la plupart le moindre mal. Que cependant il fallait songer à sa suppression, y aller progressivement, de pallier en pallier, ce qui suppose avoir en soi un réel désir de progrès pour la société. Il semble que tout au contraire, il existe une volonté délibérée de déformer ses propos, ou alors, cette société victime d’elle-même n’entend plus le français, ne le comprend plus, a perdu le sens des mots.??Il est vrai que la seule solution véritable du sida réside dans la fidélité, si belle en soi, tellement décriée. Mais de cela, cette société, qui par sa volonté de libération sexuelle à tout prix, cette pseudo révolution du siècle, est la première responsable de la propagation du sida, cette société n’en veut rien entendre. Cette société qui refuse tout effort, toute contrainte, qui veut tout, tout de suite, s’est volontairement, rendue esclave de ses propres désirs.??Dans les faits, nous sommes en présence de deux conceptions diamétralement opposées, que rien ne peut rapprocher, dont les langages, eux-mêmes sont impénétrables l’un à l’autre. C’est comme si l’on voulait comparer des incomparables, la lumière à l’obscurité, ou parler de couleurs à un aveugle de naissance. Alors qu’il s’agit de deux domaines qui n’ont rien à voir l’un avec l’autre, on s’acharne à le faire.

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